En 1964, Pierre Boulez installé en Allemagne projette de revenir en France, il répond à une sollicitation du ministère de la Culture et fait une proposition de réforme de la direction de la musique... En 1966, André Malraux nomme Marcel Landowski à la direction de la musique, provoquant la colère de Pierre Boulez qui annonce dans la presse son exil volontaire en Allemagne et sa rupture avec la politique musicale française. En 1969, Claude et Georges Pompidou veulent réparer cet incident diplomatique et au nom de la modernité triomphante des 30 glorieuses rappellent Pierre Boulez pour lui offrir la place qu'ils estiment être la sienne. Pierre Boulez décline l'offre de diriger un orchestre et propose alors un centre de recherche musicale tourné vers les nouvelles et balbutiantes technologies numériques ; en position de force, il parvient à négocier des fonds importants et une quasi indépendance. [https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/pierre-boulez-tout-prix-la-naissance-de-lircam] PIERRE & BOULEZ, LE PARADOXE entre tradition et avant-garde [entre crochets, nos commentaires] Pierre Boulez « Je ne suis doué que pour ça » Mardi, 5 Janvier, 2010 Entretien avec Maurice Ulrich Moment privilégié avec Pierre Boulez, autour de la musique née dans la seconde moitié du XXe siècle avec Stockhausen, Berio, Nono, Ligeti. Où il est également question de l’engagement des intellectuels… Maurice Ulrich - Pierre Boulez, ce qui me frappe chez vous désormais, c’est votre éclectisme dans le choix des œuvres que vous dirigez. Bruckner par exemple, récemment, en tout cas des musiciens qui peuvent sembler aux antipodes du compositeur que vous êtes. Pierre Boulez - Oui, parce que ça me barbe de jouer toujours la même chose. Si on me demande de jouer le Sacre du printemps maintenant, je dis non. C’est une œuvre que j’adore mais je dis non. Je préfère faire ce que je n’ai jamais fait. Maurice Ulrich - Vous avez dirigé deux fois l’Oiseau de feu sous la pyramide du Louvre ces derniers mois… Pierre Boulez - C’était l’Oiseau de feu, pas le Sacre… Je viens de faire à Vienne un programme avec les Nocturnes de Debussy, le premier concerto de Schimanowski pour violon et le Poème de l’extase de Scriabine. Des œuvres que j’ai déjà dirigées mais il y a dix ans et j’ai évolué entre-temps. Ce qui m’intéresse, c’est de changer de paysage. J’ai fait une fois une tournée avec différents orchestres et quelques œuvres qui se répétaient au moins cinq fois. Cela devenait un cauchemar, je savais à chaque fois où les mêmes défauts allaient réapparaître, les mêmes qualités aussi mais c’était insupportable… Maurice Ulrich - On a pu dire de vous que vous aviez un rapport très intellectuel à la musique. C’est aussi un rapport extrêmement sensuel. Qu’est-ce que la musique pour vous ? Pierre Boulez - Oh ! C’est très simple. La musique, ça représente mon existence. Les deux se sont identifiées. Mais je vais vous dire quelque chose d’un peu bébête, je ne suis doué que pour ça !… Je n’ai donc pas eu de mal à faire un choix. J’ai eu à un moment une certaine conscience de ce que je voulais faire et c’était ça. Maurice Ulrich - Quand cela ? Pierre Boulez - À quinze ou seize ans, pas plus tôt. Je vivais dans une toute petite ville où il n’y avait aucune vie musicale. La ville la plus proche était Saint-Étienne, où il n’y avait pas non plus grand-chose. Les études de piano ont décidé, cela se faisait dans les familles. Mais je n’avais aucune idée de ce que pouvait être une carrière musicale. On jouait en petits groupes, entre amis, entre amateurs et c’était d’ailleurs intéressant, au moins on faisait de la musique active. Maurice Ulrich - Vos parents étaient un peu réticents… Pierre Boulez - C’est parce qu’ils étaient aussi ignorants que moi. Mais cette ignorance les retenait alors que moi, elle me poussait. Maurice Ulrich - Une définition de la musique tout de même ? Pierre Boulez - C’est une manière de s’exprimer, de voir le monde et d’exprimer le monde. Exprimer ce que l’on ressent, ce que l’on espère qui touchera les autres. En même temps, la musique, c’est tout ce qui fait du bruit, depuis le gosse qui tape sur un tabouret jusqu’au plus grand virtuose. Il y a le son qui est là, et chez les gosses il y a le désir du bruit, le désir du chant. J’ai été élevé dans une institution religieuse, il y avait une chorale, cela a fait partie de mon éducation musicale. On ne chantait sans doute pas très bien mais nous étions impliqués. Maurice Ulrich - Vous avez aussi une passion de l’art d’une manière générale. On connaît vos rapports avec la peinture de Paul Klee mais j’ai découvert aussi chez un collègue une photo de vous aux côtés de Jean Genet, par exemple. Il y a toujours eu chez vous une appétence intellectuelle, artistique, littéraire. Pierre Boulez - Oui, oui… J’ai connu tous les gens de ma génération, Robbe-Grillet, Butor, Claude Simon, des peintres aussi comme Nicolas de Staël qui était passionné de musique contemporaine. Sans doute y a-t-il eu entre nous des rapports d’émulation intellectuelle. J’ai beaucoup discuté avec Michel Foucault. Au début de l’Ircam nous avons fait un symposium avec lui mais aussi Gilles Deleuze et Roland Barthes. Ils s’intéressaient tous aussi à la musique. Derrida également. Barthes aurait voulu être chanteur de lieds allemands. Maurice Ulrich - Il n’a pas réussi vraiment. En tout cas il n’est pas très connu pour ça… Mais qu’est-ce que vous vous disiez au fond ? Pierre Boulez - Des tas de choses. On parlait de ce qu’on était en train de faire les uns et les autres mais ce n’étaient jamais des conversations planifiées, on se rencontrait comme ça, ce n’était pas un colloque à chaque fois bien sûr, avec Michel Butor par exemple, j’ai aussi beaucoup parlé de musique… Maurice Ulrich - Dans votre parcours, il y a eu la période très importante de Darmstadt, en Allemagne, avec dans les années 1950 les compositeurs qui ont inventé, si l’on peut dire,la musique de l’après-guerre, vous, Berio, Nono, Stockhausen, Ligeti… Pierre Boulez - Ce qu’il y avait de plus intéressant à Darmstadt, c’est que s’y sont retrouvés des gens qui avaient été, si je peux dire, enfermés pendant six ans par la guerre, pendant treize ans en Allemagne, depuis 1933. Nous n’avions pas voyagé, nous étions enfermés dans une culture nationale étroite. L’Allemagne voulait rattraper ce retard. Des gens qui avaient été contraints au silence reprenaient la parole, artistes, journalistes… Certains que j’avais connus à Berlin dans les années 1920 étaient revenus à la tête de la radio, ils étaient des propagandistes de la modernité. À la radio française dans ces mêmes années, c’étaient des nouilles… Maurice Ulrich - Pour les Allemands, c’était aussi une réappropriation de leur culture. Pierre Boulez - Oui bien sûr. Tous les réactionnaires s’étaient plus ou moins compromis avec le nazisme. Ceux qui revenaient étaient ceux des avant-gardes qui avaient été stigmatisés avec « l’art dégénéré ». Et puis il y avait beaucoup d’argent. La télévision n’existait pas, tout allait aux radios. Elles mettaient à notre disposition des ressources exceptionnelles. Maurice Ulrich - Si vous permettez, ce que vous dites me suggère une parenthèse. Je me souviens très bien avoir vu, je crois que j’avais alors une quinzaine d’années, Stockhausen en répétition, en début de soirée, sur ce qui était alors la seule chaîne française. Pierre Boulez - Oui c’était possible à ce moment-là. Quand on pensait que la télévision était un instrument culturel. Maurice Ulrich - Revenons à Darmstadt Pierre Boulez - C’était des rencontres européennes. Il y avait des gens qui venaient d’Angleterre, d’Allemagne bien sûr, de France, d’Italie. Et puis sont venus des gens de Pologne, de Hongrie pour voir ce qui se passait dès qu’ils ont pu le faire. Ligeti est venu à partir de 1956. À partir de 1952 et jusqu’à 1955-56, j’y ai donné des cours. Il y avait énormément d’échanges, des controverses, des engueulades entre des gens qui se confrontaient. Maurice Ulrich - Quels étaient vos rapports à vous, qui étiez déjà l’une des têtes de cette modernité, avec des gens aussi différents que Stockhausen, Berio, ou Nono… Pierre Boulez - Ils étaient excellents à cette époque. Plus tard ils ne se sont pas gâtés mais nous nous sommes éloignés les uns des autres. J’ai encore beaucoup vu Stockhausen jusque dans les années 1970. J’ai revu Berio quand il était déjà très malade. Nous avons fait un concert de ses œuvres et des miennes à Rome et nous avons dîné ensemble après. C’était un beau moment… Maurice Ulrich - En même temps, vous aviez des visions politiques, sociales ou philosophiques très différentes. Stockhausen, une sorte de mysticisme, Berio et Nono avec des préoccupations politiques qu’apparemment vous n’avez pas, mais vous faites des musiques qui sont dans le même feu. Pierre Boulez - Même dans la musique il y a des divergences profondes. Je n’ai jamais été dans une musique que je dirais réflexive comme Stockhausen, j’étais plutôt dans une musique d’action [????]. Berio, c’est plus hétérogène. Nono était d’une austérité implacable. Et lui qui était membre du Parti communiste n’a jamais obéi au réalisme socialiste et ces choses-là. C’est cela d’ailleurs que j’ai respecté en lui. Il a gardé ses idées et a essayé de les faire passer, par-delà les appareils. Maurice Ulrich - Il avait cette idée de certaines avant-gardes du XXe siècle que l’art devait être révolutionnaire dans la forme comme dans le fond, plus exactement que c’était intimement lié. Pierre Boulez - Oui, mais les incompréhensions ont été totales et je crois pouvoir dire que lorsque Nono a découvert la réalité de l’URSS, il en est mort. En tout cas, il a été complètement effondré. Le sens de sa vie s’est écroulé. Maurice Ulrich - Avez-vous l’impression que ce souffle de Darmstadt est épuisé ? Pierre Boulez - Non, il y a un esprit qui existe toujours. On m’y a invité mais j’ai refusé parce que ça fait un peu comme le spectre qui arrive cinquante ans après, je suis le seul survivant et la période est passée aussi en ce qui me concerne. Et puis ce n’est plus un moment de découverte comme ce le fut… Maurice Ulrich - Que s’est-il passé dans la société pour que cet enthousiasme autour de la musique contemporaine soit marginal ? Pierre Boulez - Détrompez-vous. Il n’y a jamais eu autant de commandes d’œuvres que maintenant. [????] Quand j’étais jeune, elles étaient très rares. J’en ai eu une seule en cinquante ans. Les Notations. Il est vrai que lorsque je dirigeais l’Ircam, je n’allais pas me commander une œuvre à moi-même. [et Repons ? qui a monopolisé l'IRCAM pendant des années au détriment des autres créations] [Dans quel monde vit Boulez pour percevoir autre chose que la réalité ?] Maurice Ulrich - Oui, mais enfin le public de la musique contemporaine n’est pas très large. Pierre Boulez - Si vous voulez, mais c’est comme en peinture par exemple. Si vous exposez un jeune artiste, même au Centre Pompidou, il y aura quelques centaines de personnes. Si vous exposez Kandinsky, vous en aurez des milliers. En musique maintenant, les salles sont pleines quand on joue Stockhausen, Ligeti, Berio… [???? 2010] Maurice Ulrich - Vous avez parlé de l’Ircam. Pourquoi l’avez-vous fondé ? Pierre Boulez. Parce que je me suis rendu compte que, dans la vie professionnelle d’un musicien, il n’y avait pas de place pour l’expérimentation. [« pas de place pour l’expérimentation » ???] On écrit, on livre, on joue et au revoir. [Boulez n'est pas un explorateur... ? En réalité il se contredit, il a toujours retravaillé ses mauvaises expériences compositionnelles écrites]. Il faut un endroit où les gens peuvent étendre les moyens de la musique. [IRCAM : un lieu « étendre les moyens de la musique »] Il faut une sorte de clergé régulier en plus du clergé séculier. [pour Boulez il faut l'institution pour étendre les moyens de la musique : sa contradiction réside exactement là, le résultat ? la décadence de la musique savante en France par son institution = son contrôle politique]. Une abbaye où les gens peuvent se recentrer, méditer. [l'IRCAM était un lieu de malaises où tout le monde se parlait tout bas en chuchotant]. À l’époque, je dois dire que c’est Georges Pompidou qui m’a appelé. J’étais à la campagne et on m’a téléphoné, de l’Élysée. J’ai cru d’abord que c’était une blague bien sûr… Il m’a invité à dîner, avec Claude Pompidou et lui, et m’a dit : « On aimerait que vous reveniez en France, on sait ce qui s’est passé avec Malraux mais on aimerait que vous reveniez. » [pourquoi ne pas avoir appelé Xenakis aussi, voire l'ensemble des compositeurs concernés pour s'accorder ensemble sur des solutions ? Xenakis avait déjà inventé l'ordinateur à dessiner de la musique. Mais Xenakis, aux yeux du pouvoir, n'était pas assez représentable de la France bourgeoise ; et, trop gauchiste... (sic). Et les autres ? ça n'en parle même pas]. Maurice Ulrich - Quoi donc, avec Malraux ? Pierre Boulez - Oh, c’est quand il a nommé Landowski à la tête de la musique, passons. J’ai répondu que si c’était pour la direction d’un orchestre, c’était non, mais que j’avais un projet pour une fondation qui voulait avoir un département musique et que cela ne s’était pas fait. J’avais mon projet sur les bras et voilà, c’est devenu un département du Centre Pompidou. Il y avait des moyens, une aisance budgétaire. Maurice Ulrich - Maintenant l’Ircam, c’est international. On vous a présenté dès cette période comme un dogmatique, faisant une musique aride. Pierre Boulez - C’est stupide. Si c’était tellement aride, croyez-vous que l’on remplirait les salles [????] ou qu’on me demanderait de venir ici et là en permanence ? [rien à voir avec son aridité sérielle combinatoire et son dogmatisme, mais + sa réputation de chef d'orchestre + que de compositeur] Maurice Ulrich - Parmi les contemporains, il y a des gens que vous suivez particulièrement et que diriez-vous à un jeune compositeur ? Pierre Boulez - Je suis des gens comme Manoury, Dalbavie, Hurel… Je suis très attaché, sinon, à cette académie à Lucerne avec des étudiants de dix-neuf à vingt-cinq ans, compositeurs, chefs, exécutants. Le programme y est très exigeant. À un jeune compositeur je dirais de travailler. Ne pas tomber dans la tentation du format existant et ne pas être original à toute force. Essayer de trouver sa propre originalité mais travailler. [2de contradiction boulezienne : « Ne pas tomber dans la tentation du format existant et ne pas être original à toute force » = ne pas choquer la bourgeoisie finançante. C'est ce qui justement lui manque dans ses compositions, l'originalité de l'invention d'un autre contexte propre à ses compositions : il se contente du contexte des instruments de musique classique auquel il soumet un ordinateur discret (dans la musique, pas dans les moyens ni la durée), exécutant les parties électroniques de sa musique : Répons. Boulez a favorisé les compositeurs portant une esthétique attachée à la musique classique romantique du XIXe siècle.] Maurice Ulrich - Vous n’avez jamais été vraiment engagé mais vous avez bien un regard sur le monde. [« Pour ma génération qui pensait à une avancée de l’histoire, les déceptions ont été considérables. Tout notre idéalisme a été coupé en morceaux. »] Pierre Boulez - Je crois qu’il est assez déboussolé. Quand on voit certaines choses, je pense aux élections aux États-Unis, même si ce n’est pas évident, ça laisse toutefois espérer un peu. Je ne suis pas sceptique mais l’histoire, je crois, est une vaste sinusoïde. Les livres d’histoire me dépriment. On bâtit des empires et puis ça s’écroule et ça recommence… Pour ma génération qui pensait à une avancée de l’histoire, les déceptions ont été considérables. Tout notre idéalisme a été coupé en morceaux. Je pense à Budapest, à la Pologne dans les années 1950. Au fond je suis toujours resté assez isolé. Je ne suis pas non plus un ours, cela dit. Je pense que les hommes politiques sont là pour servir et pas pour se servir mais franchement, voilà, je crois que l’engagement d’un intellectuel, je pense à Sartre par exemple, c’est toujours un peu du bazar. [Boulez était sourd à tout ce qui ne venait pas de lui, despote Boulez l'était, Pierre était passionné de composition. Dans une institution comme l'IRCAM, un outil de travail pour les compositeurs, sa fermeture d'esprit à toute suggestion de la nouvelle génération (non-néoclassique) a transformé le centre en source de décadence de la musique savante parisienne. Il avait de quoi ressentir : « ... les déceptions ont été considérables. » Son despotisme ne lui a jamais permis de se remettre en question, de dialoguer avec la génération des jeunes compositeurs qui inventent. On comprend alors « sa méfiance » envers l'originalité. Un Mauricio Kagel ne faisait pas partie de « ses amis » qu'il n'avait pas puisque son despotisme les a fait tous fuir de l'IRCAM.] Maurice Ulrich - Mais dans la grande période italienne, en musique, au cinéma, en France, on parlait de Jean Genet tout à l’heure, il y a eu des œuvres importantes, qui portaient du sens politique ? Pierre Boulez - Oui, à la fin Genet s’est beaucoup engagé, mais il y avait une dimension personnelle aussi, le suicide d’un garçon qu’il aimait beaucoup… Maurice Ulrich - Il y avait eu les Nègres avant, les Paravents… Pierre Boulez - Non mais bien sûr, le travail d’un artiste, c’est autre chose. Ce que je veux dire, c’est que c’est facile de défiler dans la rue avec un petit drapeau et que diriger le New York Philarmonic, c’est autre chose, au point de vue sociologique, ça je vous le garantis. Il faut s’engager pour faire ça et lutter contre une classe sociale. [!!!! dans la salle de concert, il n'y a pas de CRS prêts à charger.] Maurice Ulrich - Qu’est-ce que vous voulez dire par « lutter contre une classe sociale » ? Pierre Boulez - Mais une classe sociale qui s’installe dans un fauteuil ! Quand on a fait les concerts à prix unique, on a vu venir des gens qui ne venaient jamais au concert auparavant. Ça, c’est un combat que je peux mener en connaissance de cause. En fait, je n’ai pas eu de chance au début. Je me serais bien engagé dans une façon de corroborer une certaine direction. Mais les directives intellectuelles à cette période étaient d’une telle bêtise que ce n’était pas possible. [« une classe sociale qui s’installe dans un fauteuil ! » Il est clair que le public de son époque était toujours respectueux du compositeur. En achetant son billet, ce public (enfauteillé) achetait son adhésion à la musique qui allait se jouer. Même une musique ratée s'applaudit : « faut rentabiliser son billet ». Le scandale public vient quand le public à un accès gratuit aux concerts. C'est ce qui s'est passé le 21 juin 1984, lors de la création à « l'espace de projection » de l'IRCAM de la musique intitulée : « Il m'est impossible de donner un titre à ce phénomène... » où les gens hurlaient et se battaient dans la salle.] Pierre Boulez en bref : Pierre Boulez est né le 26 mars 1925 à Montbrison dans la Loire. Après des études de mathématiques spéciales, il se tourne vers la musique en 1942. À Darmstadt entre 1954 et 1965, il prononce de nombreuses conférences et s’y affirme comme une des plus fortes personnalités de sa génération. En 1966, il dirige Parsifal à Bayreuth, puis Tristan et Isolde au Japon. Fondateur de l’Ircam à Paris et de l’Ensemble Intercontemporain, il dirige en 1976 la Tétralogie de Wagner à Bayreuth dans la mise en scène de Patrice Chéreau, pour le centenaire du Ring. En plus de ses compositions, il est l’auteur de nombreux écrits sur la musique et l’art et mène toujours une activité intense de chef d’orchestre avec les ensembles les plus prestigieux. Entretien réalisé par Maurice Ulrich [https://www.humanite.fr/node/430301]