l'image de la dictature et la dictature

elle nous aime, mais même pas

 

 

En regardant les films du type THX 1138 (1971), 1984 (1984), Starship Troopers (1997), Matrix I, II et III (1999-2003-2004), Equilibrium (2002) ou V for Vendetta (2006) qui traitent de la même dictature mécanisée, cela ne nous rassure-t-il pas « de savoir » que notre « monde » ne soit pas comme celui montré dans ces films ? Notre monde est à la fois moins simpliste, mais il inclut la dictature montrée dans ces types de films. Cette dictature dans notre monde n'est pas aussi flagrante, ce qui nous fait dire : « heureusement qu'on ne vit pas ça ». Si à la fin du film, c'est ce que vous ressentez : c'est que le film est un pur produit de propagande (volontaire ou involontaire, peu importe puisque l'effet existe) : « il te fait sentir en sécurité » comme il est dit dans Equilibrium. Par contre s'il nous fait éprouver un sentiment de révolte, dans ce cas, c'est un film ambigu : il dénonce pour la nième fois un système totalitaire simpliste dans un futur inexistable inspiré du nazisme spectaculaire d'Adolf Hitler (qui c'est construit après la défaite de la Première Guerre mondiale) - dont « 1984 » de Georges Orwell écrit en 1948 et « The Brave New World (le meilleur des mondes) » d'Adolf Huxley écrit en 1932 pour les plus connus se sont inspirés - et en même temps il rassure que notre monde ne pourra jamais être totalitaire, ou s'il l'était il y aura toujours des résistants pour que notre civilisation ne s'égare pas dans une dérive inhumaine. Ce qui est faux : nos sociétés sont composées de micro organisations qui vont du fascisme à l'anarchisme sous un joug global d'une monarchie républicaine aux dérives inhumaines permanentes. À quoi servent de tels films ? Quel était le but des réalisateurs et des productions ? Est-ce la fascination de l'esthétique de l'ordre et du contrôle absolu ? Nous serions intéressés de le savoir. Car ils laissent planer un doute entre dénonciation et fascination en utilisant des clichés produits de nos visions simplistes du monde et de l'existence : qui nous rassure puisqu'ils nous font plaisir dans les deux cas : il représente l'eau qui fait passer la pilule : ils soulagent (d'un possible fascinant qui n'existera jamais : ce qui est un mensonge rassurant).

Brûler les oeuvres des artistes fait immanquablement penser à, 1. au nazisme qui brûla une « montagne » (plutôt un tas) de livres sur Postdam Platz à Berlin : une impression tellement forte qu'elle reste encore dans les esprits de ceux qui ne l'ont pas vécu (il est à noter que cette « cérémonie » nocturne fut organisée de façon circonstentielle et non préméditée, il n'est même pas sûr qu'Adolphe Hitler fut même au courant), et 2. le récit de Ray Bradbury « Fareinheit 451 » où les pompiers n'éteignent pas les feux, mais les allument pour supprimer les livres et les oeuvres d'art du passé. Brûler les oeuvres des artistes du passé à un tel impact émotionnel sur la population [1] que la raison pourrait être que : supprimer ce qui représente le passé supprime le savoir de notre origine : et nous devenons des orphelins abandonnés. Un pré-sentiment terrifiant. Même si ce savoir de notre origine est inconnu, mais nous ne venons pas de nulle part, il y en a eu d'autres avant nous : matérialisé par les oeuvres des artistes.

Après l'exemple et l'expérience du système nazi (abréviation allemande de national-sozialist) et du fascisme en Italie de Mussolini, beaucoup de romanciers se sont posé la question : « et si le système nazi-mussolinien avait gagné la guerre, à quoi ressemblerait notre monde aujourd'hui ? ». Mais maintenant ce qu'il faut savoir concernant la Seconde Guerre mondiale, c'est : qui étaient vraiment ceux qui manipulaient et dirigeaient les opérations de ce conflit mondial qui ne concernait en rien les populations du monde ? Nous savons aujourd'hui que les figures médiatisées ne sont pas les personnes gouvernantes. Pour la raison simple que la communication et la médiatisation demande un temps de travail qu'il est difficile de partager avec par exemple la direction d'un pays ou pour une vedette de partager avec la création : d'autres dans l'ombre travaillent pour l'image idole qu'elle doit représentée. Le désir de vouloir tromper son prochain en faisant croire qu'une seule figure est capable d'un tel « massacre » c'est considérer son prochain comme un idiot : il est vrai que l'Histoire est plus aisée à construire avec des figures représentatives et négatives (Hitler, Staline, Mussolini qui focalise le public plus sur du symbolique que sur du fait) qu'avec la complexité des intérêts des protagonistes qui ont réellement agis pendant les conflits. La Seconde Guerre mondiale reste encore un choc pour l'humanité entière, et chaque jour on découvre des intérêts attachés à l'ennemi dans le camp des alliés. Nous savons depuis les années soixantes que les grosses multinationales d'aujourd'hui se sont construites sur la misère des populations produite par la guerre. La guerre mondiale est le paroxysme de l'appauvrissement maximal de la population planétaire et plus une grande masse de gens s'appauvrissent et plus une petite minorité d'individus s'enrichissent : plus la minorité est réduite plus ses individus sont riches. La guerre mondiale est toujours très tentante pour cette petite minorité et la guerre froide d'aujourd'hui se passe entre les nations, et la minorité des multinationales privées avec la corruption au centre. Où dans un camp comme dans l'autre les individus sont mobiles en fonction de leurs intérêts personnels. Certaines nations sont vendues, d'autres résistent, d'autres profitent et d'autres jouent un « diplomatisme » complexe pour être dans aucun camp ou dans tous les camps à la fois.

Et la population ? Quel rôle joue-t-elle dans ce jeu de force ? La population, elle est servile. Elle accepte une servitude volontaire. Nous savons aujourd'hui grâce aux expériences nazies reprises à la fin du XXe siècle par Stanley Milgram [2] qu'environ deux tiers : les 2/3 de la population occidentale obéit à une autorité qui la décharge de toute responsabilité jusqu'à torturer un innocent à mort. Chaque individu servile de la population obéit (en échange d'une récompense : le salaire, ou d'une punition : l'amende) à l'exécution d'une tâche à son niveau insignifiante. La masse salariale est la masse des serviles. Pour une récompense (le salaire), le salarié s'emploie à une tâche qui lui déplait et la justifie par sa nécessité (injustifiable) : s'il ne travaille pas il ne mange pas (la punition). Tous ceux qui manifestent pour l'augmentation des salaires manifestent pour le renforcement de la servitude par l'augmentation de sa récompense. L'exemple paroxystique des soldats américains qui jouent avec les torturés face aux caméras choque en dehors de ce contexte d'exécution servile tout en se faisant acheter l'image par les médias pour choquer la morale des populations : les médias en question pensent faire une bonne action morale en dénonçant les faits en les montrant au public, en fait ils renforcent l'association servile dans la punition. Le CRS qui défigure un opposant le fait pour protéger la nation, mais il ne le pense même pas : son niveau intellectuel doit être réduit au maximum pour éviter de penser pendant les combats : sinon il ne combat plus. Même chose pour la police, elle exécute les ordres de ceux qui gouvernent pas de ceux qui la paye : nous avec nos impôts, si elle pensait elle n'exécuterait plus. Un fonctionnaire des impôts a le pouvoir sans vouloir le savoir de ruiner une famille et de nuire à l'aisance de chacun au lieu de l'aider, mais lui ne remplit que des formulaires et il a toujours un chef responsable au-dessus. Le film « Brasil » de Terry Gilliam montre bien ce procédé. L'Administation protège les intérêts des gouvernants pas des gouvernés, mais les gouvernés acceptent d'être gouvernés en payant leurs gouvernants pour les gouverner. Eh oui c'est absurde me direz-vous, alors pourquoi vous continuez votre « boulot » comme une fatalité ? Grâce à l'éducation : c'est elle qui vous retire toute force de décision : le conformisme, aujourd'hui renforcé par la culture. La culture vous offre du divertissement en masse pour que vous ne pensiez pas et vous dit quoi dire. La culture ou plutôt la politique culturelle et l'industrie culturelle vous vendent du bonheur à consommer (qui justifie le salaire de votre servitude) pour vous environner d'un bonheur factice (qui ne vient pas de vous-même, mais fabriqué pour tous). Cette stratégie n'est pas nouvelle, elle a été utilisée par les Grecs contre les Lydiens pour les soumettre sans déploiement ou action de force militaire, nous rapporte Étienne de la Boétie dans son ouvrage « Discours de la servitude volontaire » écrit en 1549 (un exploit de lucidité pour un jeune homme de 19 ans). La force d'une nation ou d'un groupe économique réside dans le degré de servitude volontaire de sa population : pas dans les discours convaincants d'une figure dirigeante : le discours ne convainc pas il affirme la conviction de chacun qui se rattache au groupe majoritaire [3]. Cette servitude volontaire est un piège très vicieux : elle empêche nos civilisations d'évoluer et même elle les ruine au bout d'un certain temps. La servitude volontaire à la tendance d'effacer le sens de l'existence et sans sens de l'existence il n'y a plus de vie possible, de nécessité à vivre : la civilisation ne peut que se laisser mourir. De très nombreux exemples nous ont déjà précédés. Aujourd'hui (début du XXIe siècle), les artistes sont pourchassés à coups de récompenses (de subvention à taux risibles) pour effectuer des tâches qui ne leur incombent pas : celui du désir politique d'éduquer la population, le trop connu « lien social ». Ce qui veut dire : « harmoniser » les désirs de chacun à ne désirer que le divertissement donné par l'État, acceptée par une majorité consentante qui n'a pas choisi cet état.

Nous savons que ces systèmes politiques s'installent en dehors du contrôle unique de qui que ce soit. Le coupable n'existe pas. Le contrôle unique est impossible, il y a trop de ramifications incontrôlables dans nos sociétés. Personne n'a la capacité de réaliser à lui seul un contrôle absolu sur autant de monde concerné (contrairement à ce qu'avance la presse), mais par contre de le développer, de le renforcer, oui : ou de le laisser aller là où il convient sans intervenir ou juste par d'une suite de pichenettes ou de chiquenaudes. Il n'y a pas de complot planétaire comme semblent le suggérer certains documents de la résistance : même si ses acteurs le désirent. Le complot est spectaculaire et ne peut être que dévoilé, il répond à la demande de spectacle : il est public, l'organisation gouvernante elle est privée. Le spectacle renforce les médias, c'est une forme excellente pour occuper les esprits dans des histoires inexistantes, mais spectaculaires : égarer les esprits et vendre les produits divertissants du type « la révélation du mystère de la conspiration des... » est très vendeur : accapareur d'esprit à des choses futiles, Guy Debord nous l'a assez répété. Un système politique dans une organisation gouvernante ne peut pas être spectaculaire sinon le système se dévoile et risque de ne plus fonctionner. Un système public qui fonctionne pour des intérêts privés, dévoilé meurt. Il y a toujours des associations de « faiteurs » sans mal ni bien : on ne peut pas ne pas se rassembler pour réaliser un quelconque projet : il faut toujours du monde. Chaque association cherche et essaye d'influencer le pouvoir en sa faveur : ces conflits d'intérêts n'existent que dans la sauvegarde de ces pouvoirs. Le profit est l'un de ses accès et il y en a toujours un qui se risque volontairement d'être président : le profil d'un ego frustré à combler d'illusions qui manipule les autres en étant manipulé. Le système se mord la queue, c'est pour cela qu'il ne peut évoluer vers une organisation plus « humaine » où l'un ne réduit pas l'autre à l'esclavage, où les images du type cage dorée et pauvre liberté n'ont plus court.

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Notes
[1] Il faut savoir qu'il est impossible de supprimer toutes les oeuvres d'art du passé en une seule fois : il faudrait des années de guerre pour cela et en même temps ces oeuvres disparaitront avec le temps même avec le travail acharné des historiens et des archéologues. Au-delà de la musique grégorienne inscrite il n'y a que quelques traces éparses que nous sommes incapables de nous figurer : nous les interprétons vu de notre présent. Notre civilisation vit dans un passé et un futur fictif : remplie de sensations cultivées par l'éducation du possible pour le futur et de l'acquis pour le passé. Au lieu de vivre notre présent, nous désirons une éternité illusoire en dehors du temps. Ce désir d'éternité fausse l'image de notre existence en nous faisant « rater » nos instants : ceux qui rendent heureux.
[2] Illustré entre autres par Henri Verneuil dans son film « I comme Icare » en 1970.
[3] Cela explique entre autres pourquoi des figures indésirables sont constamment élues. Parmi les électeurs indécis, d'après Brehm et Mann, un tiers se rattachent toujours à la majorité votante, même contre leurs opinions. (voir « Les Attitudes » par Raymond Thomas et Daniel Alaphilippe, collection « que sais-je » PUF)

 

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