rion riorim
opéra en architecture ?
Parlons avec le compositeur de cette musique inouïe créée en 1983
dans les buraux des ministères et des institutions parisiennes !
Anne Belmont - Comment définir et comprendre votre musique nommée RION RIORIM ?
Mathius Shadow-Sky - Rion Riorim est une musique de société, de jeu avec le réel (à l'opposé du spectacle) de lutherie architecturale (l'archisonique ou l'architecture musicale conçoit des « caisses de résonnance » des bâtiments habités ou des instruments de musique habitacles ; géants, forcément), c'est-à-dire, incluant dans l'instrument son contexte social précis d'écoute (l'architecture comme l'art et la musique sont soumises à l'idéologie, soit de l'artiste qui est sa démarche artistique, soit à l'idéologie du commanditaire qui est forcément dogmatique). Composée en 1983, destinée (à l'époque) à être vécue dans « le ventre creux » du centre d'art contemporain Beaubourg à Paris [imaginez un trop gros cube noir si impressionnant parce qu'il paraît être trop grand pour être à l'intérieur du musée où il semble étouffer tout l'espace intérieur du musée Beauboug. Il s'agissait à l'époque de construire un choc psychique par la lutherie architecturale : « réveillons-nous ! »]. De Rion Riorim, il ne reste presque plus rien, tellement la musique de Rion Riorim (avec la musique musculaire Tension et mon opéra Momus) choqua le monde parisien des arts et de la musique. La maquette de Rion Riorim a été écrasée, à force de la balader de bureau en bureau, d'institution en institution. Certes, Rion Riorim (avec Tension) est une musique violente, mais cette violence n'est ni intérieure à la musique ni hostile, car son objectif n'est pas de nuire, mais d'aider à révéler les illusions du « confort moderne, et de la communication et des services ». Le confort de vivre, de ce qu'on ignore, parce que ça se fait oublier par sa constance invariable. La constance des choses ignorées pour être oubliées avec Rion Riorim réapparait indubitablement aux personnes qui pénètrent l'instrument bâtiment Rion Riorim.
AB - Alors. Qu'est-ce qui peut motiver les gens à vouloir entrer ?
MS - Le restant de curiosité non encore annihilée. Sachant qu'uniquement 33 personnes peuvent pénétrer le building instrument à la fois. Les moyens employés pour créer cette musique sont volontairement hors norme (qui modeste n'aurait pas le sens d'exister pour entendre le concept qui est à sa base créatrice). En comparaison de ce que coûte une création musicale attendue, voire au-delà des coûts d'un opéra classique qui détient le record des dépenses publiques les + élevées pour la musique, tel que construire un bâtiment de concert uniquement pour vivre cette musique et pas une autre (sic), et ça, en dehors de toutes les normes de sécurité imposées à la construction de bâtiment public (sic) est un défi envers toutes nos convictions de vie en société. Le coût de cette création musicale dépasse « tout ce à quoi on s'est habitué, à ce qui doit être financé pour entendre la musique ». Rion Riorim s'inscrit dans la continuité de mes musiques spatiales archisoniques (ou mise en architectonique instrumentale), où l'architecture contextuelle s'adapte à la musique parce qu'elle est son instrument de musique ; et pas le contraire, comme il est d'usage de soumettre la musique à une fonction d'accompagnement architectural (= la salle de concert doit être remplie de musique, sic), qu'à l'origine elle n'a pas à servir « d'ameublement » de la crainte du vide du silence (dont Érik Satie s'est moqué gentiment). L'architecture des philharmonies et des maisons opéra oblige les compositeurs à produire la musique attendue formée par ces bâtiments. Rion Riorim est une musique archisonique qui pour exister a besoin d'un budget équivalent à un film hollywoodien grand public, mais sans caméra, où les visiteurs ne se projettent pas dans l'illusion d'un écran, mais vivent dans le contexte réel créé et construit (comme on construit une ville) ce qu'ils et elles viennent à décider d'y vivre : « à vouloir entendre cette musique » par la jouer, devenant musiciens en pénétrant le bâtiment instrument. Une audition active qui n'offre aucun délassement.
AB - Je comprends que vous remettez en question la raison sociale de comment on se comporte avec la musique.
MS - Absolument ! Mais mes détracteurs, pour se moquer, parce qu'ils sont incapables de repenser la création musicale, considéraient cet opéra comme un « train fantôme » ou des « montagnes russes » de foire (sic), là où on va pour décharger son excès de peur accumulée dans le monde hostile et impitoyable du travail, par un choc d'adrénaline (sic) *. Rion Riorim, je ne le nie pas, est un parcours pour accéder à sa conscience, qui endormie par le confort, forcément, secoue l'intérieur de l'auditeur musicalisant (sans le savoir, au début, et le sachant à la fin).
AB - Est-ce une thérapie ?
MS - Je n'ai pas la prétention d'aller jusque-là ! Ma formation psychothérapeutique est très légère ! et principalement avec Ronald D. Laing. Sachant que l'art et la musique existent depuis la naissance de l'humanité à servir entre autres de « médecine de l'âme », il est clair que la musique ne sert pas de diversion, de bruit de fond rassurant, ou de signalement, comme la politique s'en sert, à divertir pour empêcher les individus du public de prendre conscience du présent (concrètement, pas sentimentalement). La musique donne un sens à la vie aux âmes égarées. Réjouir, est une médecine de base. Poésie, musique et soins (et autres) formaient ensemble le savoir du chamane.
AB- Où sont aujourd'hui les plans et les partitions de Rion Riorim ?
MS- Je dois avoir ça quelque part ! Mais en effet, en 2025, rien n'est vraiment publié depuis 1983, ou que partiellement : ici un plan sommaire, là le poème d'origine, mais traduit, du XIIe siècle de Charles d'Orléans **. Mais je me rappelle très bien de toute la musique de Rion Riorim, jusqu'aux détails de la lutherie architecturale et de comment cette musique sonne et existe. Avec la lumière de la pénombre qui par sa mobilité fait qu'on ne sait pas si on perçoit une illusion ou la réalité.
AB - Pour quoi créer des musiques si ambitieuses, dont les coûts dépassent tout ce que le monde de la musique a pu créer, est-ce pour ne pas les entendre ?
MS - Il existe plusieurs raisons qui mêlent : ma démarche artistique personnelle, le sillage historique que je prenais à développer ce que Stockhausen et Xenakis apportèrent à la musique, mais sans leur idéologie impériale, et le contexte du tournant malsain que prenait nos sociétés quant à la création musicale et artistique. Les « compositeurs néoclassiques » (qui reproduisent la musique romantique du XIXe siècle, sic, témoigne de la régression de la musique) apparaissent à cette époque. En société, tout projet ambitieux est toujours remarquable, surtout quand il défie toutes les conventions et les normes et les morales qui interdisent sa création et sa pratique musicale et celle compositionnelle de s'épanouir. Momus, mon opéra happening en 1981 autour du carillon de St-Germain l'Auxerrois, en face du Louvre, fait partie de ma série de compositions musicales impossibles entendre dans nos sociétés policées à volonté totalitaire. Ces oeuvres deviennent des preuves et +. Elles font apparaître au grand jour les états d'esprit contraints à la peur qui élèvent les murs de la censure : réaction (des humains qui s'habillent de l'armure uniforme de la fonction publique hiérarchisée à jouir à nuire du pouvoir qui les surpasse) qui révèle notre profond malaise social. Le pouvoir d'interdire est le propre du pouvoir (qui commande les autres). Rappelons-nous qu'en 1981 commence officiellement la guerre de la politique culturelle contre les artistes authentiques. Où il s'agissait de chasser du domaine public politique tous les artistes provocateurs qui mettaient dans la tête des gens des idées de liberté. Rappelons-nous aussi qu'apparaissent à la fin des années 70 les 1ers ordinateurs personnels, les 1ères interfaces audionumériques, ainsi que le 1er synthétiseur numérique à synthèse par modulation de fréquence, ainsi que le protocole d'échange entre tous les instruments de musique (pas que : les projecteurs d'images, la lumière : l'éclairage, etc.) numériques, le MIDI. Avec le MIDI, un seul ordinateur pilote un orchestre de (1 à 16x4 = 64) synthétiseurs (machines MIDI) en même temps ! Tout ça porte un enthousiasme envers la technologie dont rêvait Edgar Varèse *** qui rend possible ce que tout créateur rêvait depuis longtemps et en premier : la chose impossible de faire voltiger les sons de la musique partout dans l'espace. Ajoutons que la provocation artistique est saine quand elle réveille une conscience endormie qui s'autodétruit par la crainte qui force une autofrustration, chassée de sa conscience, pour pouvoir être niée.
L'idée de la musique de Rion Riorim m'est arrivée à l'esprit parce que je voulais donner à entendre tous les obstacles qui existent, naturels et artificiels, dans son parcours émission/réception : de l'esprit du compositeur à l'oreille de l'auditeur ; à ce que, comment une musique (et par contraste, d'une douceur infinie) peut se faire entendre dans la chaîne de transmission des machines qui peuplent nos existences (en intermédiaires) quand elles se détraquent. Rion Riorim a commencé avec le constat de la chaîne d'encodages/décodages qui s'interpose à la perception et à l'émission ou l'expression ****, ce à partir d'une seule source : le poème de Charles d'Orléans « Je meurs de soif auprès de la fontaine » qui est une douce plainte du paradoxe de l'existence humaine. De ce poème en ancien français datant du XIIe siècle, j'ai posé tous les encodages/décodage entre l'expression vocale solitaire (de la douceur amère d'une mère esseulée ?) jusqu'à sa destination finale publique. Le chant du poème est magnifique, mais il est inaudible dans la musique. + la musique est belle + la musique est inaudible (pareil pour les monstres - selon Lovecraft - : + les monstres sont invisibles + les monstres sont effrayants). Car ce n'est la musique du chant dont il s'agit ici, mais la musique des encodeurs, de toute la chaîne des encodeurs : de l'esprit, jusqu'à l'équipement de communication audio et vidéo, incluant le contexte architectural (géo-graphique = la trace de la Terre) où rien ne fonctionne : est-ce pour forcer à être oublié ? Tel l'écho ou la résonnance de l'hégémonie actante dans les états d'esprit en manque de savoir vouloir pouvoir se gouverner.
Cette idée de base génère le cauchemar réellement vécu du public (dans la chose publique = où l'humain est chosifié = mécanisé à obéir) qui veut entendre la musique. Toutes les règles de sécurité de l'espace public sont transgressées. C'est important. Le désir aigu de sécurité est proportionnel à la violence régnante dans nos familles et nos sociétés.
Rion Riorim est une musique qui à l'avance, sans avoir été créée, est interdite par toutes les commissions institutionnelles. À 22 ans, je n'avais pas cette conscience que j'ai à 64 ans, que la fougue de la créativité qui me faisait foncer intuitivement dans l'antre de la domination politique, qui devait provoquer la remise en question de ses agissements nuisibles de violence et de censures envers les autres et envers eux-mêmes.
La musique de Rion Riorim commence au guichet avec la vente des billets : + de billets sont vendus qu'il n'y a de place. Que 33 personnes peuvent assister à la musique, 34 billets sont vendus, dont 1 empêche l'accès de la personne détentrice, parce qu'il y a des portiques d'accès automatiques (comme dans le métro) qui interdisent l'accès. La musique de Rion Riorm commence par l'impuissance humaine qui ne peut pas se défaire de son obéissance envers les machines gouvernantes. Il n'y a pas mieux qu'une machine pour interdire (c'est pour cette raison qu'elles envahissent notre quotidien). Le scandale de la personne frustrée exprime la musique de l'espèce humaine piégée. Sa vocalisation est enregistrée et retransmise en différée, tel un écho qui se cogne aux parois du bâtiment cube noir et qui s'accumule avec les autres pour former le choeur des âmes frustrées. L'excès de colère de la personne exclue qui s'accumule en choeur renforce le malaise les personnes admises au concert, non pas par être témoin de l'exclusion, mais par constater leur incapacité de désobéir (au protocole du cheminement) pour aider une personne en souffrance, en détresse.
L'architecture de la salle de concert conçu spécialement pour cette musique (oui !) est un cube noir de 10 à 15 mètres de côté, monté sur pilotis bas : des colonnes rondes basses (de 2,3 mètres maximum) donnant l'impression d'écrasement du bâtiment sur soi.
Une fois les 33 personnes admises traversent les portillons automatiques, elles sont dirigées, par un chemin grillagé et des flèches peintes au sol, mais sans personnel vivant de maintenance que des mannequins immobiles en uniforme, vers le seul ascenseur du bâtiment. Ascenseur qui les amène à l'intérieur du cube noir : la salle de concert. Le noir du cube de 15 mètres de côté a un effet absorbant à l'opposé de ce qu'un miroir reflète, c'est ce qui fait de lui être inquiétant. Mais avant de rentrer dans l'ascenseur, toutes les personnes doivent se déchausser pieds nus (sans bas ni chaussette). La chaussure, en ville, est comme une armure protectrice de la pollution du sol foulé hors terre : les chaussures enlevées en ville accentuent une vulnérabilité du corps par les pieds qui peuvent être blessés par les débris de fer et de verre sur le bitume et le béton. Rentrées dans l'ascenseur, dans son mouvement il y a un effet dynamique qui donne l'impression que l'ascenseur file à une vitesse très élevée vers le bas, alors qu'il monte très lentement. Sensation de vertige. Les effets de sons en trajectoires et de lumières donnant l'impression de filer à grande vitesse en sens inverse (vers le bas) provoquent le 1er paradoxe d'incertitude. Le son dans l'ascenseur file de haut en bas (où les haut-parleurs sont dissimulés derrière les parois de l'ascenseur). Arrivés à destination 15 à 20 minutes après, les spectateurs se voient être dans une sorte d'antichambre de béton cru où les chaussures avec bas et chaussettes sont déposées par terre pêle-mêle sur la moquette épaisse qui contraste avec le béton rugueux des murs. La musique de la sensation des pieds nus est jouée par les différentes textures au sol : de la dureté granuleuse brûlante (d'une mer de sel) à la mollesse collante froide (d'un marais). L'antichambre en sortie d'ascenseur est un lieu étroit où les personnes sont gênées dans leurs mouvements à se baisser pour placer leurs chaussures dans un coin (pour pouvoir les récupérer, mais elles seront lâchées en vrac à la sortie, autre que l'entrée). L'accès étroit (+ étroit qu'une porte) à la salle de concert oblige à ne faire passer qu'une seule personne à la fois marchant à 4 pattes pour traverser le petit couloir. Cette disposition empêche la conversation familière côte à côte et peut provoquer des remarques à haute voix de « ceux qui se croient malins » (qui en réalité sont + touchés que les autres). Tout ça fait partie de la musique.
Rappelons que le bâtiment cube noir absorbant est dans un musée public : un bâtiment dans un bâtiment. À l'arrivée du public à l'intérieur du cube noir, l'espace est totalement noir avec la sensation d'une profondeur infinie, sans pouvoir rien voir, que la plate-forme lumineuse (voire, aveuglante d'une lumière blanche intense) en forme de langue qui s'élargit jusqu'à sa circularité du bout. Cette plate-forme aveuglante sur laquelle on marche pieds nus pour accéder à sa chaise métallique numérotée est instable parce qu'elle est suspendue par des câbles. La plate-forme est faite d'un plexiglas épais de 30 cm. Les câbles qui grincent sont fixés au plafond du cube-bâtiment. Cette langue de lumière plate-forme publique est posée au centre du cube à 7 mètres du sol du cube noir et s'étend jusqu'en son milieu. 33 personnes entassées en cercle vers l'intérieur sur une surface instable de 30 m² environ (« faut qu'ça s'tasse »). À marcher sur la plate-forme lumineuse suspendue (froide ou chaude ?), ça balance et ça fait entendre des craquements accentuant l'inquiétude « des témoins » (sons ajoutés et diffusés par des haut-parleurs dissimulés). Au bout de la plate-forme, il y a 33 chaises en métal vissées à la plate-forme disposées en plusieurs cercles serrés vers le centre, où il n'y a rien, qu'un petit vide : un trou dans le sol. Cette disposition vers l'intérieur oblige les spectateurs à se dévisager.
Le chant commence quand tout le monde est installé attaché à sa chaise avec une « ceinture de sécurité » inconfortable (= qui gêne). De vieux téléviseurs cathodiques (pas d'écran plat en 1983) en cercle autour des spectateurs espacés d'un vide noir, penchés au dessus des têtes, vers les visages du public, qui manifestement fonctionnent tous mal, encerclent les 33 personnes admises assises, commencent avec hésitation à s'allumer (comme l'hésitation des barres lumineuses des néons) formant une polyphonie rythmique lumineuse d'images informes, abstraites et d'abord inidentifiables.
La chanteuse qui chante le poème de Charles d'Orléans est quelque part ailleurs, est-elle dans le noir du cube invisible du public ? impossible de savoir. C'est son visage chantant qu'on devrait apercevoir dans les téléviseurs. Mais pour percevoir le chant magnifique de douceur du poème et le visage d'une beauté à faire pleurer l'assistance, il faut un degré de concentration exceptionnellement élevé des auditeurs, car devant, sur le chant, le chant est masqué ou dissimulé par les accumulations de divers encodages/décodages en chaîne qui fonctionnent tous en filtre à déformer la beauté émise à la source par la laideur compositionnelle parasitaire formant une masse sonore et lumineuse polyphonique d'intensité supérieure au chant humain à la source, arrivant jusqu'au public par des haut-parleurs qu'on croit brisés. Mais la beauté crue et la laideur perçue ne sont que la projection des a priori inculqués ou éduqués par la morale obligée du bon goût imposé ; que chacune doit s'imposer pour ne pas être exclue du groupe : l'idée de la société génère son inverse : la terreur de la solitude. Pareil, pour la retransmission vidéo de la chanteuse, elle est déformée et multipliée par excès de parasitage composé de manière à s'entendre inattendu, qui montre encore là que les encodeurs/décodeurs ne fonctionnent pas puisqu'ils se manifestent de telle manière qu'on ne peut pas les oublier. Ou au contraire, ils fonctionnent de toute leur potentialité de variabilité.
La composition musicale de Rion Riorim réside dans la composition polyphonique des encodeurs/décodeurs superposés, à commencer par ceux qui résident dans notre esprit. Leur dysfonctionnement donne au compositeur la possibilité de les utiliser comme des instruments de musique.
L'étendue du traducteur de chaque codeur s'étend de : son arrêt (= mort : le courant ne passe plus = fermeture) à son oubli (= vie constante qui se fait oublier par sa permanence : le courant passe continu sans variation). Iván Fónagy et Mac Luhan m'ont pointé le rôle majeur des encodeurs/décodeurs de la parole et des médias dans l'expression et la perception du vivant : « chaîne de traducteurs communicants » que j'ai étendus à tous les modes (et modules) de connexion : du bioélectrique du vivant à la mécanique des machines. Les encodeurs/décodeurs forment la nomenclature de l'orchestre de la musique de Rion Riorim avec le bâtiment contenant qui est la caisse de résonnance à l'acoustique étouffante d'une chambre sourde de la musique.
Entre le passage de l'intention de la pensée à la parole, il existe un nombre d'encodeurs qui permettent la formation du langage et de la voix intelligible (qui l'est par le décodage des autres récepteurs humains autour ou connectés) : réaliser à ce que la pensée soit exprimée en parole intelligible (encodage) = comprise par celle ou celui qui écoute (décodage) puis du chant (on parle avant de chanter). La transformation (ou la traduction) de l'électricité cérébrale en parole pensée est réglée par une suite d'encodeurs. Et dans l'autre sens, celui de la perception (de la prise de son, de l'enregistrement des images) est réglée par une suite de décodeurs.
Rion Riorim joue d'une suite de traducteurs en chaîne et superposés (de l'audition, la vision, l'équilibre du corps, et autres sensations de vulnérabilité qui laisse exister la variabilité) des transformateurs/traducteurs composés polyphoniquement qui révèlent une forme musicale orchestrale où le chant n'est que le prétexte déclencheur pour entendre les multiples encodeurs/décodeurs, qui ne fonctionnent pas comme ils le devraient pour donner à percevoir l'intelligibilité du chant à paroles avec la cohérence attendue de toute communication. Ce qu'on entend est la multiplication acoustique de la voix en orchestre symphonique où il est impossible de percevoir la réaction orchestrale à la production vocale, car la composition de l'orchestre des codeurs est réalisée de manière à ne pas pouvoir faire de lien mécanique (simpliste) entre la cause et l'effet. « Instinct mécanique » qui est cru gérer le temps conséquent des êtres vivants (sic).
Comment le chant beau sort de la bouche ? S'il est empêché par les grimaces (expression des encodeurs détraqués). Les grimaces faciales ne sont que le résultat du reflet des grimaces intérieures qui tordent les cordes vocales et le souffle à ne pas pouvoir sortir fluide de la bouche (même principe que dans la musique Tension où les contractions des muscles empêchent de jouer la fluidité gestuelle au contraire de jouer heurté), mais par à-coups. Ces à-coups forment la rythmique de la vocalité transformée de Rion Riorim (humanisée par l'attristement doux du chant qui est exprimé par le poème de Charles d'Orléans) qui naît solitaire de la berceuse et en commun du travail physique (dans les champs, mais plus dans la construction).
Rion Riorim donne à percevoir, plutôt percentendre et perceressentir que n'importe quelle perception est la formation d'une traduction d'autre chose que nos sens ne peuvent percevoir. Autrement dit, que de tout ce qu'on perçoit, il n'y a que notre espèce qui le perçoit. Ça, parce que nos encodeurs/décodeurs sont communs à tous les membres de chaque espèce, ce qui empêche la communication pour la compréhension entre espèces (aussi, entre cultures humaines différentes).
AB - Donc la musique Rion Riorim est une pensée qui est une décharge électrique qui en arrive par encodage/décodage en série à ne pouvoir être chantée que pour se transformer en musique orchestrale parasitaire ?
MS - En + d'enrober la musique d'un contexte d'insécurité. Parce que là, l'audition se sensibilise + quand le corps est déséquilibré et la vision impossible ou difficile (comme mes musiques que j'ai concertées dans le brouillard et des tourbillons de vents accompagnant les voltiges des sons de la musique dans tout l'espace).
...
MS - Et dans toute cette architecture périlleuse, mais non dangereuse, où l'audition, l'équilibre, la vision, l'évaluation de l'espace, etc., sont perturbés (il s'agit bien de ça, de remettre en question nos croyances), il y a des gardiens immobiles assis ou debout dans plusieurs coins du bâtiment, mais qui sont en réalité des mannequins en plastique que dans la pénombre ont confond avec des êtres humains.
AB - À quoi servent-ils ?
MS - Ils servent à renforcer l'absence d'assistance à remettre sa volonté aux services d'ordre et de secours, c'est-à-dire ils donnent à prendre conscience qu'agir de soi pour soi et les autres est mieux que de se faire agir par les autres.
...
Notes
* Aujourd'hui au XXIe siècle, on se contente de voir des films d'horreur (qui ne sont plus d'épouvante) sur nos écrans portables, dont la majorité font sourire, parce qu'ils manquent (ou ne touchent pas) le principe fondateur de la terreur : le pire est invisible.
** Publié, il n'y a que ça ! : à http://www.centrebombe.org/riorim.html où il manque le noir noir : le RION du RIORIM
« The first encodage is the translation from old French to modern French,
the next encodage is the rewriting poem by Shadow-Sky.
See the next encodages during the piece... [lien oublié]
The text is interesting because it is a pure sadness feeling with ununderstandable sentences that is confronting with the encodages' problems generating a kaleidoscopic perception of sounds and pictures. The poem has nothing to do with the musicart result.The hidden beautiful melody: [listenable only through disfunctionable series of encoders/decoders, from our body through the audio/video technology]
Page 1 of the Rion Riorim face's grimaces.
There is 56 grimaces during 13 minutes of music going slowly from one to an other.The translated poem from 12th century by Charles d'Orléans (in French):
Je meurs de soif auprès de la fontaine
Tremblant de froid du feu des amoureux
Aveugle suis si l'autre m'aime
Pauvre mes sens ne sachant entre eux
Trop négligent en vain souvent songeux
C'est de mon fait une chose ténébreuse
Par bien et mal enche(min)vêtres amenésJe gagne le temps et perds maints mois
Je joue et ris me sentant douloureux
De blessence j'ai d'espérance plaine
J'attends le bon heurt en regret engoisseux
Rien ne me plais et suis si désireux
Je me brouille envers mes pensées
En bien de mal le noeudale démenéJe parle trop et me tais à grand-peine
Je me débats en peur si courageux
Tristesse tient mon confort en démène
Faillir ne puis aux mains d'entre eux
Maladie ne m'est en santé donnée
En bien et mal de chemins emmenésSur un hasard j'essayerai quelque année
Par delà le bien et le mal ma fortune menée. »
And at:
http://www.centrebombe.org/lab5.html#anchor755389
the short description [improved] of:
« the 1983 Black Mirror Cube Building: an anti-resonant anechoic chamber musical instrument for the Rion Riorim's music. Indeed, the building is a musical instrument, where the audience penetration and strolling excites thr building musical instrument to resonate. The audience are the musicians of the Rion Riorim's music [without any electronic movement detector].
The only way to get in the concert hall: the Black Cube of Rion Riorim is to take the lift. Nobody knows if the lift goes down or up and it takes a long time to arrive to the first room, an antechamber where everybody has to take out their shoes. Then the entrance gives to a big light suspended [unstable] "tong" of Plexiglass. The inside of the Cube is totally dark. At the bottom there is 33 metal chairs looking at the centre put in circle. The public sit on the chairs. Broken TVs and loudspeakers surround the circle of chairs, they are in the dark invisible. In this silence and darkness, time to time a flash light suddenly everywhere. Just before the start of the song, the strong white light of the "tong" suspended platform (by cables) decreases suddenly. In the total silent deep darkness, the old TVs starts one by one turning on with difficulties. Then, the unheard song starts the music with a beautiful unseen face who sing an unheard beautiful melody: with the poem of Charles d'Orléans, but step by step: the mental code [the encoding 1], the gesture code [the encoding 2], and the communication media code [the encoding 3] changes all the "translators" to access with “High Fidelity” the ear of the listener, and this general parasitism generates the orchestral polyphony of sounds and pictures naturally impossible to do with a single singing voice. Being immersed by a multisonic parasitic grimaces, where everything is puckering including the audio and video technology, the audience of 33 people at each time experience the nonsense to live controlled by the machines. The Rion Riorim coda is: the faces of the public fade with performer face which are filmed and shown on broken TVs and impossible to see. At the end of the music (nobody never know when) to exit the place, the luminous platform became little by little a slide where the listeners are evacuated by being pushed and pulled by invisible people (because they are dressed and masked in black) outside the black cube. »
*** Mais dès les « premiers pas » de fonctionnement de cette technologie audio numérique, nous avons compris que l'utilisation de la technologie en musique est fragile, et qu'en +, dans ses premiers pas, ses actions n'étaient pas directes, mais différées (sic) : les temps de calcul pour rendre un son audible ou une image visible prenaient (au début) plusieurs jours et nuits. C'est à ce moment qu'est apparu le terme « temps réel » que les machines numériques ne peuvent pas s'actionner (dans le cas où on les rend autonomes) et ne pourront jamais l'être (les mémoires tampons servent à donner l'illusion de l'instantanéité des actions des machines). L'enthousiasme pour la technologie est vite retombé, au vu des pannes fréquentes et des difficultés rencontrées à toute installation. Le pire était le plantage de tout le système pendant le concert ! Plantage toujours possible en 2025 !
**** J'ai lu à cette époque le livre d'Iván Fónagy : La Vive Voix (1983) qui développe « la théorie de la démotivation et remotivation du signe linguistique associant le mécanisme [réactif] des actes individuels [éduqués] au processus de la genèse de la langue. Sa théorie du double codage suppose 2 encodages successifs : 1 encodage linguistique qui transforme un message en une séquence de phonèmes, et 1 encodage au cours duquel le message secondaire, gestuel, se greffe sur le message primaire. » EU en ligne, https://www.universalis.fr/encyclopedie/ivan-fonagy/ que j'ai généralisé à toute la chaîne de communication : du désir indicible du compositeur (de l'artiste de créer quelque chose in situ, ici et maintenant), passant par la technologie électrique et électronique de diffusion mondiale du son et des images (incluant le texte visible pour être lisible) jusqu'à l'entendement de l'auditeur, au-delà de son sens de l'audition, jusqu'à l'intérieur des profondeurs de ce que l'humain entend de la vie. J'avais lu Marshall Mc Luhan (avec l'école de San Diego - Paul Watzlawick, Janet Helmick Beavin, Don D. Jackson, Une logique de la communication, trad. fr. 1972) dont sa thèse réduite à : « le message est le médium », théorie qui confondue avec celle de Fónagy ouvrait la voie à la compréhension des obstacles qui peuplent la transmission de la compréhension entre les êtres humains ; que j'ai synthétisé par la généralisation de la traduction. => S'il y a encodage/décodage, il y a traduction, c'est-à-dire une « interprétation » de ce qui a pu être compris, transposée par et dans un autre médium. Ça, commençant par l'entendement de l'audition : « tout ce qui vibre frappe nos tympans (membranes auriculaires, part de notre audition), cette frappe provoque l'audition : celle qui nous donne l'idée qui appartient au sens de l'ouïe : la métamorphose (= traduction) des vibrations en sons. Le son est l'audition de l'identification de la vibration = l'attachement d'une vibration au sens de sa production retenu par la mémoire pour être recoonu. Le son, contrairement à la vibration, existe que parce que nous humains auditionnant, existons, savons que nous existons par le fait d'être mémorisé. Toute idée est une impression sur la ou de la mémoire. Autrement dit, sans la mémoire du fait d'entendre des identifiables = des sons, on serait sourd par ne pas pouvoir donner un sens à l'entendu. Pareil pour les autres sens.
On se sert de la technologie comme matelas [buffer compensatoire] d'illusions que nous nous sommes construits (par incompétence d'autonomie - les machines nous assistent dans nos actes - et par compétence de construction - on les construit -) dans le seul but d'atténuer notre autonomie d'agir, par se faire agir, croyant atténuer ainsi la peur épaisse qu'on cultive par la terreur collective par la violence autoinculquée à obéir à l'inobéissable. Il y a là en effet quelque chose qui ne va pas, et depuis longtemps !
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